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| Jacqueline Jencquel | |
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| Sujet: Jacqueline Jencquel 27.08.18 19:40 | |
| [size=62]"Le bridge, ça me barbe." Jacqueline Jencquel veut mourir avant le naufrage[/size] Jacqueline Jencquel à Paris (Jacqueline)
Son cas est inédit. Jacqueline Jencquel, 75 ans, n'a pas de maladie incurable. Elle veut juste en finir avant d'être trop vieille.Par Marie Vaton Publié le 27 août 2018 à 17h51
Jacqueline Jencquel est une vieille dame très indigne. Elle porte des jeans et des baskets, saute en parapente, randonne en montagne, pratique quotidiennement la muscu, aime se bourrer la gueule de temps en temps et embrasser son amoureux, de 30 ans plus jeune qu’elle. Elle a de la chance : à 75 ans, les années passent et semblent glisser sur elle. A part quelques "désagréments", de l’ostéoporose, des "vertèbres tassées", elle est "en relative bonne santé" et ne manque de rien : ni d’amour ni d’argent. Celle qui partage sa vie entre la Suisse et Paris a trois fils aussi présents que possible, des petits-enfants à gâter et une vie dense remplie de voyages, de livres, de fêtes et de rencontres.
[size=42]Pas de discours larmoyantPourtant, Jacqueline a décidé de mourir. Dans un an et demi, en janvier 2020, "si tout se passe comme prévu", elle réunira ses copains et ses enfants à Paris dans son restaurant préféré. Comme d’habitude, elle fera rire tout le monde et comme d’habitude ils auront des débats passionnés sur la vie, la politique et l’amour. Elle leur dira à quel point elle les aime et qu’elle a aimé sa vie. Le lendemain, elle prendra le train pour Bâle, en Suisse, où habite son amie Erika Preisig, médecin et présidente de Lifecircle. Avant d’ouvrir elle-même la mollette libérant le barbiturique de sa perfusion, du pentobarbital de sodium, elle devra répéter à voix haute qu’elle est lucide et consciente, donner sa date de naissance et dire que sa décision est irrévocable. Son départ sera rapide : pas d’oraisons funèbres ni de discours larmoyants. En quelques secondes, elle basculera pour toujours, le sourire aux lèvres, comme dans un rêve profond et agréable dont on ne veut pas se réveiller. Jacqueline n’est ni folle ni dépressive. La mort ne lui fait pas peur : "On en fait beaucoup trop pour un truc somme toute d’une extrême banalité", dit-elle, pince-sans-rire, lovée dans le canapé de son appartement parisien. Elle n’a aucun mépris pour la vie non plus, qu’elle "croque à chaque seconde". Ce qu’elle n’aime pas, c’est la souffrance, la déchéance, la dépendance, la folie et la misère qui accompagne, selon elle, "le processus inéluctable qu'est la vieillesse". [size=42]"Encore belle"[/size]Finir "avec des couches", sur un fauteuil roulant, démente, les yeux hagards, être un poids pour la société, "emmerder ses enfants", inspirer l’ennui, la pitié, la crainte puis le dégoût, "trembler", "boiter", "baver", "puer", ça non, elle ne veut pas. Elle veut partir "encore belle", toujours aimée et respectée. Elle veut choisir de finir sa vie "en pleine conscience" comme elle dit, tant qu’il en est encore temps, tant qu’elle peut encore le faire. "En France, la question de l’euthanasie est d’une hypocrisie sans nom. On prétend décider à partir de quel degré de souffrance extrême on peut autoriser les gens à mourir et donc, arrêter leurs soins. Mais à partir de 75 ans, on a mal partout ! La vieillesse est en elle-même une maladie incurable à l’issue toujours fatale."Pour elle, le "grand âge", comme on l’appelle pudiquement, "n’a jamais servi à quoi que ce soit, en tous cas dans nos sociétés occidentales : on ne baise plus, à moins de payer pour cela, et on finit dans un Ehpad, à moins de payer aussi". Jacqueline se fiche bien d’être politiquement incorrecte. "C’est pas à mon âge que je vais jouer à la mamie."Elle veut mourir et puis voilà. Et tant pis si cela lui vaut parfois des commentaires acerbes sur le blog qu’elle tient sur le site du Temps, en Suisse. Récemment, une ancienne amie l’a copieusement traitée d'"enfant gâtée" : "Comment une personne aussi belle et en bonne santé que vous l’êtes peut-elle souhaiter se suicider ?" lui a-t-elle dit en substance. Elle s’en moque : "Que voulez-vous, la mort est si taboue chez nous", dit-elle en balayant l’air de ses doigts fins. "Je n’y peux rien si certains trouvent plus digne de se débarrasser des vieux dans des mouroirs où on les laisse crever seuls comme des animaux."[size=42]L'âme russe[/size]Jacqueline sait bien que son projet choque, qu’elle passe sur les réseaux sociaux pour une vieille capricieuse, narcissique et suicidaire : "Il est inconcevable pour l’espèce humaine, dont 80% est occupée à survivre, de choisir la mort à la vieillesse. Moi, j’appartiens à une classe privilégiée, cela m’a donné tout le loisir d’y réfléchir."Sans doute aussi est-elle bien plus terrifiée par l'idée de vieillir qu'elle veut bien l'admettre. Combien de temps lui reste-t-il avant que "[sa] peau, ridée comme un vieux sac en croco Hermès et [sa] bouche de grenouille" finissent à avoir raison des sentiments qu'elle arrive "encore" à inspirer ? "Que voulez-vous? Je n'ai jamais réussi à me passer d'amour."Elle confie, les yeux brillants : "Je trouve mon copain merveilleusement beau, je peux passer des heures à le regarder, blottie tout contre lui." Cette grande amoureuse a l'âme russe, romantique et tourmentée d'une jeune Anna Karénine... Sa mère, Galia, avait huit ans quand elle a vu sa maman mourir dans d’atroces souffrances d’un cancer du sein avec métastases au foie et dans les poumons. "Dans la Russie de Staline, en 1930, il n’y avait pas de médicaments ni pour guérir ni pour soulager la douleur. Ma grand-mère, Nadia, avait 38 ans et suppliait son mari de l’achever, ce qu’il n’a pas pu se résoudre à faire."Peu de temps après, il a fallu fuir la répression contre les "intellectuels". "Mon grand-père, Mikhail, pourtant professeur de marxisme-léninisme à l’université de Moscou, a pris le train pour Vladivostock pour tenter de rejoindre la Chine. Il a ensuite marché des jours et des jours avec sa petite fille et d’autres fuyards, de nuit, à travers la Mandchourie, en buvant l’eau de marécages pour survivre. Dans le groupe, il y avait un bébé. On le bourrait d’opium pour l’empêcher de hurler. Il en est mort", raconte-t-elle. En arrivant à la frontière chinoise, le passeur dénonce tout le monde, sauf Mikhail. Il arrive finalement en Chine, caché sur le toit d’un train. Galia épousera plus tard un avocat de Saint-Pétersbourg rencontré dans les concessions. C’est là, à Tien-Tsin, que Jacqueline naît en 1943 avec, tout au fond d’elle, une angoisse et une peur de la souffrance "sans doute transmises génétiquement", qui ne la quitteront jamais. "Je n’ai jamais su rire aux éclats même dans les meilleurs moments de bonheur, confie-t-elle. Aujourd’hui, je suis enfin sereine : j’ai eu une belle vie et je n’ai plus personne à protéger."[size=42]Le bridge, "ça me barbe"[/size]Jacqueline a vécu en Chine, en France, en Allemagne et au Venezuela où elle a suivi son mari, importateur. Elle a fait des études de langues – elle en parle sept –, et de philosophie. Elle voyage partout, tout le temps – l’un de ses fils vit à Bali, un autre en Allemagne et, même si elle vit seule aujourd’hui, aime encore Jürgen, son mari, le père de ses enfants, dont elle n’a jamais divorcé. "Il est avec une autre femme, ils organisent des bridges et des dîners tous les soirs, tant mieux pour eux. Moi, ça me barbe", dit-elle.Jürgen est d’accord avec son projet. L’aîné de ses fils est plus réticent. Tuki, le cadet, prépare un documentaire sur son dernier voyage, "une réflexion artistique sur le temps qui passe, la vie et la mort". Il témoigne : "Contrairement à ce qu'on pourrait croire, le projet de maman est tout sauf une lubie d'une vieille dame excentrique. Encore moins un cri au secours. Cela fait plus de dix ans qu'elle nous en parle."Dix ans pendant lesquels lui, ses frères et son père ont eu le temps, "non pas d'accepter sa décision", mais au moins "d'apprendre à la respecter". Dans le petit milieu des militants du suicide assisté, Jacqueline Jencquel est connue comme le loup blanc. Elle a derrière elle des années de militantisme – au sein de l’ ADMD France (association pour le droit à mourir dans la dignité) dont elle a été la vice-présidente pendant cinq ans et de l’association bâloise Lifecircle qui œuvre à "l’autodétermination en fin de vie". Elle a rencontré Jean-Luc Romero, le fondateur de l’ADMD, il y a dix ans, lorsqu’elle vivait encore à Caracas. "Je vivais recluse à la maison à cause d’Hugo Chavez et je m’ennuyais à mourir. J’avais fondé une association pour le droit à mourir et Jean-Luc m’a proposé de venir militer avec lui à Paris. Je l’ai suivi".[size=42]"Nous ne sommes pas des marchands de mort"[/size]Depuis, elle a elle-même accompagné plusieurs Français en Suisse, après avoir été formée par Exit, la plus grande association helvétique pour le suicide assisté. Elle fait aujourd’hui partie d’une de leurs commissions qui œuvre à inscrire dans la loi suisse le droit au "suicide de bilan", sans maladie certifiée médicalement. Jacqueline sait bien à quel point le sujet est sensible et tient à dissiper les malentendus : "Contrairement à l’image qui est souvent donnée de nous dans la presse française, nous ne sommes pas des 'marchands de mort'. La grande majorité des appels que nous recevons proviennent de personnes désespérées que nous empêchons quotidiennement de passer à l’acte."Si elle se bat pour la légalisation du droit à mourir dans la dignité en France, c’est aussi pour accompagner les 200.000 personnes qui tentent de se suicider chaque année, "dont beaucoup se ratent dramatiquement", "non pas à les aider à commettre l’irréparable, mais à les suivre et à guider leur discernement jusqu’à ce qu’ils reprennent le goût de vivre". Jacqueline se souvient de cette dame, qu’elle a accompagnée pendant plusieurs mois. A la cinquantaine, elle avait tout quitté, mari et enfants, pour suivre son jeune amant à l’autre bout du monde. "Le type l’a ruinée avant de la quitter. Entretemps, son mari s’était remarié avec la baby-sitter et ses enfants ne voulaient plus la voir. Elle s’est retrouvée seule, sans un sou, sans aucun espoir."Jacqueline l’a écoutée, lui a dit qu’elle l’accompagnerait en Suisse. "Mais avant, je lui ai demandé de prendre six mois pour réfléchir aux dix choses qu’elle aimerait faire avant de mourir. Elle était artiste dans sa jeunesse, son plus grand rêve était de se remettre à peindre. Six mois plus tard, nous nous sommes revues, elle avait repris goût à la vie.
Aujourd’hui, elle a ouvert une galerie d’art et retrouvé un amoureux." [size=42]"Ah c'est merveilleux"[/size]D’autres fois, le voyage est irrémédiable. "Un jour, un monsieur de 93 ans est venu me voir. Il venait d’apprendre qu’il était atteint de démence sénile, et m’a fait promettre de l’accompagner en Suisse dès les premiers signes de sa maladie. Il a réussi à faire venir ses enfants et petits-enfants, certains de New York, il a réservé la plus belle suite d’un hôtel de luxe sur les bords du Rhin. Ils ont fait la fête, bu du champagne, parlé, dansé, pleuré et ri toute la journée et toute la nuit.
Au matin, il était tellement heureux qu’il a demandé 24 heures de plus. Et le matin suivant, rebelote. Au bout de trois jours, il a tourné le robinet de sa perfusion tout seul, entourée de ses vingt descendants."Elle se souvient encore de ses derniers mots. Au moment de fermer les yeux, il a dit : "Ah, c’est merveilleux". Et il souriait. Jacqueline a déjà repoussé plusieurs fois la date de sa mort. Si la France se décide "enfin" à légaliser le suicide assisté, elle attendra le premier jour de l’application de la nouvelle loi pour mourir. Pourquoi elle ? Pour l’exemple. Parce qu'elle veut être "la première" à mourir pour la cause, sa cause. Est-elle vraiment aussi rationnelle qu'elle prétend l'être ? "De grâce, ne nous obligez pas à être mourants pour avoir le droit de mourir."[/size] |
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| Sujet: Re: Jacqueline Jencquel 27.08.18 20:23 | |
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| Sujet: Re: Jacqueline Jencquel 28.08.18 19:51 | |
| Céline Zünd Publié mardi 28 août 2018 à 14:03, modifié mardi 28 août 2018 à 17:44.ETHIQUE
[size=32]Aide au suicide: où sont les limites?[/size] Le témoignage d’une Française qui, alors qu’elle est en bonne santé, souhaite mettre fin à ses jours avec une organisation bâloise soulève la crainte d’une banalisation de la démarche, et questionne le cadre légal entourant la pratiqueLe témoignage de Jacqueline Jencquel ravive le débat sur la libéralisation de l’aide au suicide. La Française s’est donné «de un an à six mois» pour faire appel aux services de l’organisation bâloise Lifecircle, afin de mettre fin à ses jours. Elle relate son expérience sur un blog hébergé sur Letemps.ch dans un portrait publié dans les pages du journal. Ce qui frappe les esprits, dans son cas, c’est la volonté de mourir d’une personne apparemment épargnée par les affres de la maladie. «Pourquoi devrais-je me justifier? J’ai des souffrances dont je ne souhaite pas parler. Faut-il être à l’agonie pour avoir le droit de mourir?» réagit-elle à la suite des nombreux messages reçus. Le blog de Jacqueline Jencquel et son portrait. Il y a ceux qui saluent le courage de se livrer. Et ceux aussi qui s’inquiètent d’une banalisation de la mort, ou d’une discrimination du grand âge, présenté comme un motif suffisant pour en finir avec la vie. «Comment garantir, une fois franchi le pas que cette femme s’apprête à faire, qu’on ne s’arrêtera pas pour aboutir vers un eugénisme?» s’alarme une lectrice. Dans une interview sur le site Bon pour la tête, le rédacteur en chef de la Revue médicale suisse, Bertrand Kiefer, s’inquiète d’un effet entraînant d’un tel témoignage sur des personnes «fragiles et indécises». «Je ne milite pas pour l’interruption obligatoire de vieillesse, mais volontaire», rétorque Jacqueline Jencquel. Lire aussi: En médiatisant sa mort, Jacqueline Jencquel choque
Débat en cours au sein d’ExitL’exemple de cette militante soulève des questions sensibles: où placer la limite de l’aide au suicide pour les personnes qui ne souffrent pas de maladie incurable? Peut-on tolérer que l’on accompagne vers la mort des personnes, comme cette mère de trois enfants, encore assez en forme pour faire du parapente? La souffrance subjective d’un patient âgé et sa détermination sont-elles des critères suffisants pour accéder à son souhait de mourir? «Bien sûr, c’est plus facile pour nous lorsqu’une personne se présente avec une maladie lourde et mortelle», explique Erika Preisig, présidente de l’association Lifecircle. Face à une personne septuagénaire souffrant de maux liés à l’âge qui ne sont pas fatals, comme Jacqueline Jencquel, l’organisation tente de trouver d’abord d’autres solutions pour rendre la vie supportable. «Mais si le vœu de mourir est si net et fort, mon devoir est de l’aider et d’éviter qu’elle opte pour une mort violente en se jetant sous un train», ajoute la médecin bâloise. Or, selon elle, la pression sur les personnes âgées ne vient pas de l’aide au suicide, qui «n’a pas d’effet contagieux», mais plutôt des conditions insatisfaisantes dans lesquelles elles sont maintenues dans les établissements spécialisés. Lire également: Mort planifiée: une inquiétante mise en scène du suicide Bientôt une aide au suicide sans prescription médicale?Ces questions renvoient à un vaste débat en cours en Suisse, loin d’être clos. Au sein d’Exit Suisse alémanique, une commission «pour un accès facilité à l’aide au suicide» s’est constituée en 2017, avec pour mission d’examiner dans quelle mesure les critères de l’aide au suicide peuvent être élargis pour les personnes qui ont atteint un grand âge. Jacqueline Jencquel siège au sein de cet organe de 14 personnes et participe aux discussions encore en cours. «Nous militons pour que l’on cesse d’infantiliser les personnes âgées en les obligeant à se justifier lorsqu’elles veulent partir», dit-elle. La Suisse bénéficie de l’un des régimes les plus libéraux en matière d’aide au suicide: le Code pénal l’admet, du moment qu’elle ne répond à aucun «mobile égoïste». La plupart des organisations d’aide au suicide possèdent toutefois leurs propres conditions, plus restrictives que le droit en vigueur. Une personne souhaitant mettre fin à ses jours doit être capable de discernement et réaliser elle-même le geste fatal. La prescription de pentobarbital sodique doit être faite par un médecin. Enfin, les organisations acceptent d’accompagner des individus chez qui elles reconnaissent des souffrances et une volonté individuelle, claire et répétée de mourir. Une évolution de la pratiqueAvec le temps, toutefois, la pratique a évolué. Il fallait d’abord une pathologie incurable et mortelle pour pouvoir accéder à un accompagnement vers la mort. En 2014, Exit a élargi l’accès à ses service en acceptant les polypathologies invalidantes – de multiples handicaps liés à l’âge, qui altèrent la qualité de vie mais ne sont pas mortels. Ces cas représentent désormais un quart des accompagnements réalisés par Exit Suisse alémanique. L’aile la plus libérale de l’association souhaite désormais aller plus loin et permettre aux personnes «qui souffrent dans l’âge», au-delà de 75 ans, d’avoir accès au pentobarbital sans diagnostic, voire sans prescription médicale. Dès lors, il ne serait plus nécessaire de motiver la demande d’accompagnement vers la mort par des raisons médicales. En théorie, des personnes âgées bien portantes pourraient aussi avoir accès aux services d’Exit. Jacqueline Jencquel ne croit toutefois pas à cette éventualité: «Lorsqu’on est âgé, on n’est pas bien portant. On peut être en forme, mais le grand âge est toujours lié à des souffrances.» Crainte des réactionsOr le comité de l’organisation alémanique a d’ores et déjà exprimé ses réticences à l’idée de se passer d’ordonnance médicale: «Cette proposition va trop loin, explique Jürg Wiler. Actuellement, ni la politique, ni la société ne sont prêtes, en Suisse, à franchir ce pas.» L’organisation, active depuis 36 ans, bénéficie d’une relative tolérance de la population face à l’aide au suicide. Elle redoute qu’en optant pour une voie trop permissive, ce climat ne change. La commission poursuit son travail afin d’explorer d’autres possibilités d’élargir l’accès à l’aide au suicide dans le grand âge. Elle alimente ses réflexions grâce à deux avis d’experts – un juridique et un éthique – qui devraient être dévoilés lors de sa prochaine assemblée générale, au printemps 2019.De son côté, l’Académie suisse des sciences médicales (ASSM) a elle aussi assoupli ses critères relatifs à l’aide au suicide. Jusqu’ici, cet organe scientifique chargé de clarifier les questions éthiques en lien avec la médecine ne tolérait l’accompagnement médical vers le suicide que pour des patients atteints de maladies mortelles et dont la fin de vie approchait. Dans ses nouvelles directives, adoptées en mai dernier, l’ASSM accepte les «souffrances insupportables» comme critère. Un tournant vivement critiqué par la FMH. La souffrance du patient, contrairement à la fin de vie imminente, ne constitue pas un élément suffisamment objectif aux yeux de l’organisation de médecins.Lire aussi: Aide au suicide: les médecins contestent les nouvelles directivesLa Chambre de la FMH – organe législatif – doit se prononcer le 25 octobre prochain sur l’adoption ou non de ces nouvelles directives dans son code de déontologie. Dans un article du Bulletin des médecins suisses, Bertrand Kiefer appelle les délégués de la FMH à refuser les nouvelles directives de l’ASSM, qui s’apparentent à ses yeux à un «abandon» du patient au nom du principe «dogmatique» d’autonomie.Lire également: L’article de Bertrand Kiefer dans le «Bulletin des médecins»https://www.letemps.ch/suisse/aide-suicide-limites |
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| Sujet: Re: Jacqueline Jencquel 30.08.18 8:22 | |
| Jacqueline Jencquel chez Hugo Clément : «femme courageuse» ou lobbyiste ? FIGAROVOX/ENTRETIEN - Une vidéo pour le site Konbini montrant une femme âgée, mais manifestement en bonne santé, qui souhaite recourir au suicide assisté a fait le tour d'Internet. Or, au-delà d'avoir été vice-présidente d'un lobby militant pour l'euthanasie, cette femme défend une conception radicalement individualiste de l'être humain à travers la réclamation de l'extension illimitée des droits individuels, constate Damien Le Guay.
Damien Le Guay est ancien membre du conseil scientifique de la Société française d'accompagnement et de soins palliatifs (Sfap), et auteur de Le Fin Mot de la vie (Éditions du Cerf, 2014).
FIGAROVOX.- Dans une vidéo pour le site Konbini, une femme de 74 ans en pleine santé évoque son souhait de recourir au suicide assisté «parce qu'il faut bien fixer une date» (sic.). Que cela vous évoque-t-il?Damien LE GUAY.- Une dame prénommée «Jacqueline» se présente dans une vidéo, sur ce site, et indique en effet qu'elle a décidé de «recourir au suicide assisté» en janvier 2020. Elle est bien portante, n'a pas de maladie, n'est pas en «fin de vie» mais, pour appréhender des possibles dégradations, elle ira en Suisse pour se suicider car, ajoute-t-elle, elle ne trouve pas en France ce qu'elle souhaite. Sur un canapé, elle discute avec «Hugo», âgé de 28 ans (à savoir Hugo Clément - du Petit journal puis du Quotidien) et justifie sa décision. S'agit-il d'une initiative strictement personnelle d'une dame qui se sent faiblir? Non. Tout au contraire. À la fin de l'entretien, elle dit même faire ici un «geste militant». Et ce geste fait l'objet d'une orchestration médiatique qui, comme toujours dans ces affaires, ne doit rien au hasard. En même temps que cet entretien, Jacqueline apparaît aussi sur un autre site («Brut») et accorde un entretien au Nouvel Obs. Aussitôt, agitation dans le landerneau médiatique: le Point, RTL, 20 minutes… tous reprennent cette «nouvelle» (en est-elle d'ailleurs une?) sans le moins du monde la mettre en perspective, l'interroger ou même dire qui est cette dame - ce qui serait la moindre des choses pour des journalistes. - Citation :
Cette dame fut pendant longtemps vice-présidente de l'ADMD : le plus actif lobby militant en faveur de l'euthanasie. Il s'agit d'une opération de lobbying. Car cette «Jacqueline», dont le «cas est unique», nous dit avec admiration le Nouvel Obs, n'est pas n'importe qui. Elle fut (ce qui n'est jamais dit) pendant longtemps vice-présidente de l'ADMD (Association pour le droit de mourir dans la dignité): le plus actif lobby militant en faveur de l'euthanasie. Il ne s'agit donc pas d'une «nouvelle» venue de nulle part mais, bel et bien, d'une opération de lobbying en faveur du suicide assisté relayée par des médias complaisants. L'ADMD, pour faire avancer sa cause, met en scène régulièrement des cas particuliers et les médias dominants, acquis à la cause, s'en font l'écho. L'année dernière, il s'agissait de l'«affaire Anne Bert» qui, pendant neuf mois, a occupé le terrain médiatique avant d'aller en Suisse pour recourir à une injection létale. Maintenant c'est l'affaire «Jacqueline Jencquel». Avant encore, d'autres affaires qui se déroulent à chaque fois de la même manière: un cas particulier mis en exergue, une orchestration médiatique puissante, un débat qui n'en est pas un en ceci qu'il est unilatéral, des questions qu'il est impossible de poser et de nombreux journalistes qui sont à la fois juges et parties. Je note, par exemple, que les deux parrains de «l'opération ADMD Tour 2018» qui a fait la promotion de l'euthanasie cet été, étaient Wendy Bouchard (Europe 1) et Olivier Minne (France Télévision).Quand l'ADMD parle, tous les médias relaient sa propagande avec complaisance ; quand la SFAP (Société française d'accompagnement et de soins palliatifs) qui représente presque toutes les associations et tous les professionnels de la fin de vie en France, se prononce, peu de médias reprennent ce qu'elle dit et lui ouvre leurs portes. Il y a là une situation qui devrait attirer l'attention du CSA (Conseil Supérieur de l'Audiovisuel) tant les entorses à l'équité journalistique sont constantes, répétées, flagrantes. À la longue, cette inégalité de traitement devient insupportable. Elle empêche les débats, force l'opinion à penser d'une manière binaire, loin de la complexité des situations de fin de vie. Elle considère l'euthanasie comme évidente, allant de soi. Dès lors il est inutile de donner la parole à ceux qui défendent d'autres solutions, inutile de mettre en perspective ces questions. L'émotion est là, prenant toute la place, saturant l'espace médiatique au détriment des discussions. - Citation :
Cette dame va même jusqu'à considérer qu'il faudrait pratiquer à grande échelle l'euthanasie dans les EPHAD sans demander l'avis des personnes concernées. Quei est donc cette Jacqueline Jencquel? Quelles sont ses idées?Il se trouve que j'ai déjà eu, sur des plateaux de télévision, deux débats avec elle. Derrière les compliments de toute la presse qui se fait l'écho, sans le moindre esprit critique, de son «témoignage», il y a une femme de conviction, une militante active depuis plus d'une décennie. Elle fut donc vice-présidente de l'ADMD aux côtés de Jean-Luc Romero. Mais ses idées font frémir. Ainsi a-t-elle soutenu sans la moindre réserve le docteur Bonnemaison - celui qui, en 2010 et 2011, a donné la mort à sept vieilles personnes à l'hôpital de Bayonne, par injection de curare, sans concertation avec qui que ce soit et sans répondre le moins du monde à une demande des patients. Elle pense qu'il a eu raison d'agir de la sorte. Elle va même jusqu'à considérer (a-t-elle dit dans un débat avec moi) qu'il faudrait pratiquer à grande échelle l'euthanasie dans les EPHAD sans demander l'avis des personnes concernées. Elle est donc pour la généralisation de l'euthanasie pour les personnes que nul ne réclame et pour la libéralisation du suicide assisté en France - loin des «exceptions d'euthanasie» ou autres encadrements trop stricts des «suicides assistés». Tous ceux qui soutiennent le «courage» de cette dame, qui viennent l'interroger, sont-ils d'accord avec la logique de ses propositions?L'entendre parler, d'une manière franche et directe, ébranle les discours formatés des partisans de l'euthanasie qui, pour débuter, préfèrent encadrer les pratiques. Quand l'euthanasie sera devenue légale, on verra bien. Et que verra-t-on? Ce que nous constatons en Belgique: des dérives, des extensions, des «ayants droit» de plus en plus nombreux - y compris, les mineurs ou les dépressifs profonds.Quels sont les arguments avancés par Jacqueline Jencquel? Que dit-elle pour justifier le suicide assisté?Il faut entendre ce qu'elle dit tout à la fois comme un choix personnel (et tous les choix sont respectables) mais surtout comme un argumentaire (discutable lui) en faveur du suicide assisté. Il ne s'agit pas, pour cette dame, d'inscrire le suicide assisté dans le cadre d'une maladie insupportable, avec des souffrances réfractaires pour abréger une vie en train de s'achever. Non. Elle est bien portante et, de manière préventive, pour éviter ce qu'elle considère comme une déchéance possible mais non certaine, décrète l'heure de sa mort. Quel est l'argument principal qu'elle met en avant pour «justifier» le suicide assisté? La question de l'autonomie. - Citation :
- Aujourd'hui la liberté individuelle s'impose jusqu'à la mort acceptée par avance.
Ainsi décrète-elle: «La perte de l'autonomie, c'est la fin de la vie». Cette dame indique clairement qu'elle n'a pas envie qu'on s'occupe d'elle - pour les petites choses comme pour les grandes. Ni le personnel des EHPAD, ni ses trois enfants: «J'ai pas mis au monde des enfants pour les faire chier» dit-elle avec un ton qui se veut cool, jeune et sans manière. Mais considérer ainsi que la vie s'arrête avec l'autonomie, c'est refuser, pour tout un chacun, sa part de vulnérabilité. Nous en revenons là à une conception antique de la belle fragilité humaine comme une infirmité corporelle, un défaut de caractère, une déficience physiologique qui exclut de la communauté humaine. Est humain celui qui est autonome. Est en dehors de la vie, celui qui perd son autonomie. Telle est la logique du suicide assisté préventif.Logique qui est aussi celle du film La Ballade de Narayama - palme d'or en 1983, qui relate une ancienne coutume japonaise selon laquelle après 70 ans les vieux, quand ils ne sont plus «utiles» au village, doivent être abandonnés en haut de la montagne pour qu'ils y meurent de faim et de froid. Celui qui n'est plus utile n'est plus nécessaire. Sa vie ne se justifie plus. Jacqueline Jencquel fait la promotion, sous couvert de liberté individuelle, d'un suicide inévitable ou nécessaire pour ceux qui ne sont plus autonomes - et donc utile. En France cela concerne au moins 600 000 «bouches inutiles» - comme on avait coutume de dire. La ballade en haut de la montagne du Japon est remplacée, dans sa version moderne, par une ballade en haut des montagnes suisses. Quand, autrefois, on s'indignait d'une telle perspective, aujourd'hui on s'en réjouit au nom d'une liberté individuelle dévoyée. Autrefois le collectif s'imposait jusqu'à la mort. Aujourd'hui la liberté individuelle s'impose jusqu'à la mort acceptée par avance. On se croit plus libre pour être autonome et on se découvre asservit aux contraintes de l'autonomie.C'est là où il faut distinguer le suicide qui est un choix et un projet individuel et une ultime liberté, du suicide assisté qui est un projet collectif, une offre médicale qui pourrait venir s'inscrire dans la panoplie des solutions pour les personnes âgées. Ce que dit Jacqueline Jencquel, dans la droite ligne des partisans de l'euthanasie qu'elle représente, fait froid dans le dos. Il y a là tout un argumentaire cohérent de ce qu'elle nomme par ailleurs un «I.V.V.» - une Interruption Volontaire de Vieillesse. - Citation :
- Ce fantasme d'une « éternelle jeunesse » conduit à parler crûment de ses besoins sexuels qui, s'ils ne peuvent pas être exaucés, conduisent au « droit à mourir ».
L'euthanasie et le suicide assisté ne sont pas des choix individuels mais un même projet de société, une manière d'encourager le choix d'une mort prématurée pour celles des personnes qui sont «en trop» pour être à la charge des autres et de la société.Cette dame évoque son incapacité à pouvoir satisfaire ses désirs sexuels à un âge où elle voudrait pouvoir consommer des jeunes hommes en grande quantité, selon ses propres dires. Y'a-t-il un lien entre son rapport à la mort et sa conception de la sexualité?Elle indique en effet, avec cette manière de persifler sur des sujets graves, qu'elle n'a plus envie de faire l'amour, à son âge, avec des hommes de son âge «qui ont un bide énorme». Son rêve qu'elle ne dissimule en rien consiste à «sucer des beaux mecs jusqu'à la fin de l'éternité» (sic.). Ne pouvant y parvenir, elle préfère la mort. On ne peut que s'étonner du ton de ces confidences, du caractère puéril de ses fantasmes sexuels. «Jacqueline» croit n'avoir pas d'âge, ne veux pas «faire son âge», ne se résigne à rien: ni à l'usure de son corps, ni au commerce avec des hommes de son âge. Elle fait sienne ce jeunisme ambiant qui devrait pouvoir se prolonger jusqu'à la fin. Ce fantasme d'une «éternelle jeunesse» conduit à parler crûment de ses besoins sexuels qui, s'ils ne peuvent pas être exaucés, conduisent au «droit à mourir». La dignité nouvelle est celle d'une orgie sexuelle jusqu'à la fin. Si cette dignité-là est impossible, la dignité de se donner la mort s'impose.Je suis frappé par l'importance de la sexualité pour Anne Bert, l'année dernière, et «Jacqueline» cette année. Ces deux dames âgées, dont le corps ne répond plus comme avant, constatent qu'elles ne peuvent plus assouvir tous leurs fantasmes sexuels. Quand le désir sexuel est en berne, la mort est désirable. Anne Bert écrivait des livres érotiques traversés de fantaisies sexuels débridés. Jacqueline ne nous épargne aucun de ses impossibles envies sexuelles. - Citation :
- Le plus souvent, dans les arguments avancés, il n'est pas question de couple, d'aventure conjugale, de vie partagée avec un autre, de joies à voir grandir ses enfants et petits-enfants mais d'isolement, de besoins sexuels, de vie seule, de corps défaillant.
Le constat est le même: quand le corps ne répond plus, la mort devient nécessaire. Quand le corps n'est plus d'aucune utilité sexuelle, il faut le mettre à la casse - et donc en passer par le suicide.Au-delà de ce cas précis, ne peut-on pas s'interroger sur les motivations de ceux qui font la promotion du droit à mourir dans la dignité et celui d'être assisté dans leur suicide?Quelques remarques s'imposent pour conclure. Dans les deux cas, nous passons d'une liberté à un droit ; d'un choix individuel à une revendication collective. La liberté est une chose ; autre chose est la promotion, sous couvert de liberté, des normes implicites d'une société qui ne souhaite pas s'encombrer de ceux qui seraient «en trop» et donc «inutiles».En second lieu je constate que souvent ceux qui font la promotion de l'euthanasie et du suicide assisté sont seuls dans la vie, ne se sentent responsables de rien, ne veulent dépendre de personne, ni reconnaître qu'ils sont (comme tout un chacun) faits des autres, par les autres et grâce à eux. Le fantasme de l'autonomie moderne prend toute la place au point de refuser toutes nos fragilités. Le plus souvent, dans les arguments avancés, il n'est pas question de couple, d'aventure conjugale, de vie partagée avec un autre, de joies à voir grandir ses enfants et petits-enfants mais d'isolement, de besoins sexuels, de vie seule, de corps défaillant. Jacqueline dit même qu'elle a fait le tour de la vie, qu'elle ne désire rien d'autre.Il faut distinguer aussi deux questions euthanasiques: celle de la maladie et des souffrances en fin de vie et celle de l'interruption volontaire de vieillesse. La première concerne un moment particulier, quand la mort est toute proche et que des aménagements sont envisagés pour écourter l'insupportable. La seconde est un refus de la vieillesse, donc de l'âge, et donc d'un corps affaibli. La première a conduit aux différents aménagements de la loi Léonetti - jusqu'à la «sédation profonde et continue». La seconde est un appel à rétablir dans nos sociétés, et ce à grande échelle, la ballade de Narayama. - Citation :
- L'interruption volontaire de vieillesse à laquelle souhaite recourir Jacqueline Jencquel est un appel à rétablir dans nos sociétés la ballade de Narayama.
À trop tout mélanger, on sent bien que l'euthanasie et le suicide assisté ne sont pas des réponses circonstanciées qui pourraient être proposées quand la mort toute proche rend la vie insupportable mais sont des projets de société pour «régler» par la mort désirée une vieillesse devenue insupportable. Alors ceux qui refusent mordicus l'euthanasie, au risque de passer pour des réactionnaires, ne veulent pas maintenir l'indignité de certaines situations parfois inadmissibles, mais, d'une manière plus générale, ils refusent d'ouvrir la porte à l'interruption volontaire de vieillesse. Il serait bon, pour tous les journaux complaisants, d'aborder ces questions-là au lieu de faire la seule promotion des choix de Jacqueline. |
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| Sujet: Re: Jacqueline Jencquel 01.09.18 12:56 | |
| [size=46]Fin de vie : Jacqueline Jencquel refuse "qu’on prenne la décision pour elle"[/size] Jacqueline Jencquel, militante pour le droit à mourir dans la dignité, a récemment annoncé avoir programmé sa propre mort pour janvier 2020. Elle revient sur la polémique provoquée par ses déclarations. Mis à jour le 31/08/2018 | 17:44 publié le 31/08/2018 | 17:44"J’ai accepté les interviews sans trop réfléchir. D’un seul coup, je me trouve au milieu d’une tempête médiatique sans l’avoir voulu" confie Jacqueline Jencquel. Depuis quelques jours, la septuagénaire, qui a notamment été interviewée par Konbini, est sur-sollicitée. Il faut dire que sa prestation a fait parler. Mme Jencquel, qui milite à l’Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD) et en a été vice-présidente, y est simplement présentée comme une femme n’ayant aucun souci de santé particulier. Volontairement provocatrice, elle y affirme en des termes crus qu’elle ne supporte pas la vieillesse et qu’elle a programmé son suicide assisté en Suisse pour janvier 2020. Très vite, les commentaires ont fusé : Jacqueline Jencquel serait une femme superficielle, qui voudrait mettre fin à ses jours par coquetterie et égoïsme. Et le débat sur la légalisation de l’euthanasie en France était relancé.
"La condition de la pratique du suicide assisté en Suisse, c’est d’avoir une pathologie invalidante" Pourtant, l’histoire de Mme Jencquel est bien plus complexe. "On me décrit comme une mondaine qui souffre de ne plus être belle. Mais à 75 ans franchement, vous pensez que je n’ai pas eu le temps de m’en rendre compte ? Ce discours est absurde", s’indigne-t-elle. En réalité, sa décision est murie depuis des années. Elle tient d'ailleurs un blog sur le sujet. Qui plus est, le suicide "par caprice" est tout bonnement impossible sur le plan juridique, même en Suisse. Comme le note Philippe Lohéac, délégué général de l’ADMD, "la condition de la pratique du suicide assisté en Suisse, c’est d’avoir une pathologie invalidante, pas d’être devenu âgé et d’en avoir marre de la vie". Même si elle le souhaitait donc, Mme Jencquel ne pourrait choisir de programmer sa propre mort sans motif "valable". Dans le cadre de ses activités au sein de l'ADMD, Jacqueline Jencquel a par ailleurs l’habitude d’accompagner, d'aider et de rassurer des personnes en fin de vie. Par ailleurs, son propre père a été placé en Ehpad quand elle était plus jeune. Mme Jencquel connaît donc très bien le fonctionnement de ces établissements et la situation de leurs pensionnaires. Pour elle, s’y retrouver serait pire que tout, et elle a le sentiment que cette hypothèse devient chaque jour de plus en plus plausible. "Je sais que le vieillissement est inexorable. Je commence à avoir des signes de sénilité précoce", indique-t-elle, lucide. Jacqueline Jencquel s'inquiète notamment pour sa mémoire. "Il y a des choses qui me font peur. Je ne me souviens pas de ce que j’ai fait hier, je ne sais pas quel jour on est aujourd’hui…" confie-t-elle.
Pour le moment, celle-ci est suffisamment lucide pour décider du moment où elle partira. Mais ce ne sera peut-être plus le cas dans quelques années : "Quand on est très vieux, bourré de médicaments et de somnifères, on n’a plus la force de dire ce qu’on veut : c’est pour ça que je veux prendre cette décision à temps. Je n’ai pas envie qu’on la prenne pour moi." C'est pourtant ce qui risque d'arriver en l'état actuel de la loi française, selon elle. Car pour le moment, en France, c’est la loi Claeys-Leonetti qui est en vigueur : elle confère au patient "en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable" le droit de refuser ou d’arrêter les traitements, voire de bénéficier d’une sédation profonde et continue. Mais elle est peu connue et appliquée de manière inégale en fonction des services. Pour Jacqueline Jencquel, programmer son suicide assisté en Suisse serait donc une manière d'échapper à la loi française qui ne lui permettrait pas de finir ses jours dans la dignité. D’autant que la perte d’autonomie lui glace le sang. C’est sur ce point particulier que Mme Jencquel veut mettre l’accent : pour elle, les personnes âgées dépendantes sont traitées comme des enfants, une situation scandaleuse à ses yeux. "Même si on vous met dans un Ehpad de luxe, où on vous changera, on vous donnera des bains, on fera des séances de yoga, ce sera toujours infantilisant. On vous amuse comme si vous étiez un gamin, c’est très déprimant !", déplore-t-elle. Des propos pris au premier degré qui desservent la causeMme Jencquel préfère donc partir avant de connaître cette déchéance. Mais elle le répète : ce n’est que son avis, qui est bien sûr subjectif, et sa décision n’engage qu’elle. Elle parle d’ailleurs en son nom propre, et en aucun cas pour l’ADMD. Aujourd’hui, elle regrette que certains de ses propos, prononcés sur le ton de la plaisanterie, aient été pris au premier degré. Elle craint d’avoir desservi la cause, même si la vidéo de Konbini a fait plusieurs millions de vues et donné de la visibilité à son combat. " Ce que je veux, c’est changer la situation pour les personnes qui souffrent [et souhaitent recourir à un suicide assisté ou une euthanasie], et décriminaliser les médecins qui les aideraient", souligne-t-elle. Un message qui n’a visiblement pas été compris de tous. Aujourd’hui, Jacqueline Jencquel est accusée par certains de faire la promotion d’une euthanasie de masse. Et elle est sidérée : " Je n’ai jamais dit ça ! C’est terrible, je suis 150 000 fois contre une chose pareille ! C’est scandaleux." D’après elle par ailleurs, cette affirmation est d’autant plus absurde que légaliser le suicide assisté ne conduirait à aucune dérive. Elle en veut pour preuve la situation en Belgique, qui a légalisé l'euthanasie active sous conditions en 2002 : en 2015, 2021 cas d’euthanasie active ont été recensés, pour une population de 11,27 millions d'habitants. " Quand on dit qu’il y aura des dérives, qu’on va tuer toutes les personnes âgées, ce sont des mensonges. Ce n’est pas du tout ça qu’on recherche, et d’ailleurs, la population française le sait", s’indigne Mme Jencquel. D’après un sondage Ifop publié le 3 janvier 2018 par La Croix, 89% des Français sont favorables au suicide assisté. Pour l'ADMD, il faudrait donc légaliser le suicide assisté ou l’euthanasie (voir encadré). Cependant, les Etats généraux de la bioéthique, qui ont pris fin cet été, n’ont pas réussi à dégager de consensus sur la question. Comme expliqué sur le site des Etats généraux de la bioéthique, l’euthanasie " est un acte destiné à mettre délibérément fin, à sa demande, à la vie d’une personne atteinte d’une maladie grave et incurable, afin de faire cesser une situation qu’elle juge insupportable". On distingue l’euthanasie active (un tiers administre une substance létale) de l’euthanasie passive (on renonce aux traitements). Le suicide assisté, ou aide au suicide, est légèrement différent : " Un médecin ou un tiers prescrit ou fournit une substance létale que le malade s’administre lui-même", précise le site. En Suisse, l'euthanasie active n'est pas autorisée, mais l'euthanasie passive et le suicide assisté sont tolérés. En Belgique, l’euthanasie active est dépénalisée. En 2015, le cas d'une Belge de 24 ans avait fait grand bruit. Celle-ci, atteinte d'une très lourde dépression (caractérisée d'"affection neuropsychique") avait pu être euthanasiée. Selon l'avocate Jacqueline Herremans, membre de la commission de contrôle euthanasie en Belgique, sur environ 1900 euthanasies réalisées chaque année dans le pays, une soixantaine de cas concernent des malades psychiatriques. |
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| Sujet: Re: Jacqueline Jencquel 06.09.18 16:49 | |
| Editoriaux - Société - 2 septembre 2018[size=40]Euthanasie : en Belgique, ils sont nombreux à ne plus en vouloir ![/size] Francis Blanche souhaitait mourir d’une manière que j’approuve totalement : centenaire, et assassiné par un mari jaloux ! De son côté, une certaine Jacqueline Jencquel – 74 ans, mais en pleine forme – claironne, dans le journal Sud-Ouest, qu’elle a décidé de mettre fin à ses jours par suicide assisté en Suisse, en janvier 2020, « par peur de souffrir et de perdre son indépendance ». Si tous ceux qui ont la même inquiétude faisaient de même, il n’y aurait plus grand monde pour réélire Macron ; mais c’est un autre dossier… Sans surprise, on apprend que la dame milite depuis dix ans pour la légalisation du suicide assisté en France, ce qui est son droit le plus strict, mais autorise à penser que la médiatisation de son cas ressortit plutôt à la propagande. Il est vrai que Jean-Luc Romero, militant LGBT passé chantre de l’IVV (interruption volontaire de vie), pour qui le « droit » de mourir dans la dignité passerait par l’obligation de vivre dans la déraison, se fait étrangement rare, ces temps-ci. Jacqueline a longuement discuté de son programme d’exécution avec ses trois enfants, et la conclusion s’est imposée tout naturellement : « Ils préfèrent avoir une maman libre, contente, déterminée, qui décide de partir à son heure, plutôt qu’une maman malade, dépendante et dont ils doivent s’occuper. » Comme on les comprend, ces bons enfants, c’est déprimant, ces vieux auxquels on doit se forcer à rendre visite, dont on ne sait pas quoi faire au mois d’août, qui bavent et qui défèquent partout ! Et puis, on hérite plus vite, il y a les traites du 4×4 tous les mois… Une lueur d’espoir (oserais-je dire d’espérance ?) nous vient, toutefois, de Belgique. Une fois n’est pas coutume, parce que l’on sait la législation de ce pays très en pointe sur ce sujet : on y fait passer de vie à trépas aussi bien des enfants que des malades psychiatriques (bipolaires, Alzheimer ou dépressifs profonds), et les déclarations anticipées d’euthanasie y sont de pratique courante. Eh bien, la presse nous apprend que, depuis quelques années, ce sont des centaines de Belges qui sont retournés auprès de leurs administrations communales pour les retirer. L’explication est simple : dans l’immense majorité des cas, et hors militantisme frénétique, l’euthanasie est un questionnement de gens en bonne santé. Mais les médecins le savent bien, dès que se faufile dans leurs vies une maladie sérieuse, ils sont comme Madame du Barry sur l’échafaud : « Encore un instant, Monsieur le Bourreau… »http://www.bvoltaire.fr/euthanasie-en-belgique-ils-sont-nombreux-a-ne-plus-en-vouloir/
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| Sujet: Re: Jacqueline Jencquel 19.09.18 0:34 | |
| Je rêvais d’un autre mondePublié le 18/09/2018 à 09h55 - Modifié le 18/09/2018 à 16h34Erwan Le Morhedec, avocat et essayiste Capture d'écran Konbini news
- [url=https://twitter.com/intent/tweet?text=Je r%C3%AAvais d%E2%80%99un autre monde&url=http://www.lavie.fr/debats/chronique/erwan-le-morhedec/je-revais-d-un-autre-monde-18-09-2018-92841_979.php][/url]
- [url=http://www.lavie.fr/ami/envoi.php?envoiami_id=92841&envoiami_titre=Je r%C3%AAvais d%E2%80%99un autre monde][/url]
Après une vaillante résistance, je me suis résolu à visionner l’interview de « Jacqueline », cette ancienne dirigeante de l’ADMD qui a fixé la date de son suicide assisté en janvier 2020. Elle fut l’occasion d’une apostrophe en ligne : à l’abbé Grosjean qui l’interpellait sur le sens d’une vie, Hugo Clément, l’intervieweur, renvoya la pédophilie. Pour être laborieuse, voilà la réplique à laquelle les temps présents nous condamnent. Deux clercs de deux mondes, l’un affligé et l’autre conquérant. Serait-ce pour autant déroger à l’humilité imposée à l’Église qu’espérer du monde médiatique qu’il s’arrête sur lui-même et sur ce qu’il promeut ? Jacqueline Jencquel y exprime le culte de l’autonomie, le refus de l’âge et de faire l’amour à un « vieux mec au bide énorme ». Interrogée sur les religions, elle renvoie le paradis chrétien à « compter des moutons pendant toute l’éternité sur une prairie » et lui préfère la version musulmane où elle pourrait « sucer des beaux mecs jusqu’à la fin de l’éternité (sic) ». Tel est le niveau de l’intervention qui a ouvert tant de colonnes et de plateaux à Jacqueline Jencquel. Alors oui, j’enrage que la conception chrétienne de la vie soit plus inaudible encore par la faute de l’Église. Comment ne pas être saisi par la fatalité qui accablera ce monde, qui se veut conquérant ? Cette interview en est un résumé : il commence en Hugo Clément et finit en Jacqueline Jencquel. Dans ce petit monde si souvent adversaire du modèle de vie chrétienne, on célèbre la jeunesse éternelle et la sexualité vagabonde. Le jeune et « beau mec » en est l’archétype, le « sucer » semble une idée fixe. Quand le rideau du paraître se lève, que reste-t-il à Jacqueline, qui a « construit sa maison sur du sable »,sur la jeunesse et sur le sexe ? L’autonomie absolutisée vire à l’isolement. Rester en vie à 75 ans, c’est « faire chier » ses enfants. Quand vient l’âge, l’un des modèles s’épuise et ne propose plus guère que de « se foutre en l’air ». L’autre trouve dans la relation l’essence de l’humanité. Peut-être moins excitant dans les vertes années, il donne sens à la vie sans devoir se l’ôter. Alors oui, j’enrage qu’aujourd’hui un promoteur du suicide en fin de vie puisse se défausser par la pédophilie, que la conception chrétienne de la vie soit plus inaudible encore par la faute de l’Église. Mais je n’oublie pas que si sa parole est aujourd’hui bousculée, sa pratique, incarnée par des milliers de catholiques engagés, reste un témoignage pour ceux qui attendent, en fin de vie, encore un peu d’humanité. |
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| Sujet: Re: Jacqueline Jencquel 15.11.18 13:58 | |
| Tugdual Derville, délégué général d’Alliance VITA, était l’invité de Cyril Hanouna sur C8 le vendredi 28 septembre 2018, dans l’émission « Balance ton post« , face à Jacqueline Jencquel, sur le sujet du suicide assisté et de l’euthanasie.
Quelques verbatim issus de l’émission : « J’aimerais convaincre Jacqueline que le 3e et le 4e âge peuvent être des âges de grande sagesse, de grande fécondité. J’ai accompagné mon père jusqu’à sa mort, à 85 ans, il était couché. Et dans les moments les plus difficiles de sa vie, c’est là que j’ai eu des relations avec lui absolument nouvelles, de tendresse, de présence. » « Mon ami Philippe Pozzo di Borgo, qui est tétraplégique, dit que si on lui avait dit « Le suicide est possible », il l’aurait demandé dans un temps de désespérance. Maintenant, il est très dépendant, et dans cette dépendance là il rend une utilité magnifique. » « J’ai eu beaucoup d’appels de mes amis porteurs de handicap, parce que je me suis engagé depuis tout jeune auprès d’eux ; qui ont été très traumatisés par ce que vouas avez dit. Je sais que vous ne l’avez pas souhaité, mais ils ont été traumatisés parce que l’image que ça donnait c’est que leur vie ne valait pas la peine d’être vécue. » « Même chose pour les personnes très dépendantes et âgées.il y a un enjeu, dans nos EHPAD, c’est d’accompagner les personnes, de les soulager de leurs souffrances, mais ne pas passer à l’acte. Car dans les pays où l’on passe à l’acte (Belgique, Hollande, Suisse également), il y a des personnes en bonne santé qui sont euthanasiées. Il y a eu récemment en Hollande un scandale avec des malades psychiques euthanasiés. » « Le suicide est un drame très douloureux dans notre pays. On fait une prévention du suicide, et heureusement ; il touche toutes les personnes, et il y a un taux de suicide chez les personnes âgées important. C’est ça le risque : si on commence à dire qu’il y a des suicides qui sont « bons », toutes les personnes qui traversent des crises suicidaires, qui sont en grande souffrance ou en difficulté, vont se dire « La société me dit « réussissez votre sortie ». » « J’ai envie de dire à toute personne, qu’elle soit dépendante, désespérée : « Vous avez toute votre place parmi nous, dans la société ». C’est absolument majeur pour qu’on ne subisse pas la violence du suicide ; c’est très violent un suicide pour les proches. » « Si vous dites, comme vous l’avez écrit, que quand vous perdez votre autonomie c’est la fin de la vie, c’est violent pour toutes les personnes dépendantes, pour les personnes âgées qui nous entendent. » « Vous vous souvenez que Robert Badinter disait que [la loi] ça donne l’image d’une culture ; i y a un choix de société. Est-ce que les personnes les plus fatiguées, les plus malades, les plus dépendantes, on leur dit « vous avez le choix de faire cette sortie », ou alors on leur dit » Vous avez votre place parmi nous dans cette société » ? Elles sont influencées ! » « Vous savez, quand vous vous sentez inutile, ça veut dire que vous n’avez pas le regard de quelqu’un qui vous dit « Vous êtes utile » ! Ma vie a basculé à la rencontre d’enfants polyhandicapés. Beaucoup de gens pensent qu’ils ont des vies inutiles. Je dis non ! Leur fragilité, la nôtre, comptent énormément dans nos vies. Quand on commence à éradiquer la fragilité, on est tous menacés. » |
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