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 ACCELERER LA MORT

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MessageSujet: ACCELERER LA MORT   ACCELERER LA MORT Icon_minitime20.06.14 10:56

Procès Bonnemaison: des médecins expliquent pourquoi on accélère la mort
Le Berry Républicain
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L'ancien urgentiste Nicolas Bonnemaison (g) et le chirurgien Jean-Michel Gouffrant au tribunal de Pau, le 19 juin 2014 - Gaizka Iroz/AFP
 
Ils l'ont raconté devant la Cour d'assises des Pyrénées-Atlantiques, au procès de Nicolas Bonnemaison, sans détours, avec des mots parfois crus. Quand la mort approche et la souffrance grandit, les médecins abrègent, légalement ou non.
Cinq médecins ont admis jeudi à Pau avoir aidé des patients à mourir, allant parfois jusqu'à "l'euthanasie", prenant ainsi la défense de l'urgentiste de Bayonne poursuivi pour sept empoisonnements.
"Cela me tenait à cœur de venir témoigner pour mon ami Nicolas Bonnemaison. Je suis confrontée moi aussi à la fin de vie et je sais la difficulté des derniers moments", a déclaré d'emblée Marie-Pierre Kuhn, anesthésiste-réanimateur à Bayonne, avant de décrire des "moments très particuliers, à chaque fois uniques".
Et le médecin de décrire un cas, parmi les dizaines auxquels sont confrontés les praticiens tout au long de leur carrière : un patient, atteint d'un cancer du poumon, admis en soins intensifs.
"Le lendemain, très vite, son état s'est dégradé. Il fallait le mettre sous respiration artificielle, il a refusé. Sa femme m'a dit qu'il fallait respecter sa volonté. Il avait trois enfants, il a fallu leur expliquer. J'ai discuté avec mes confrères, avec la famille…. Tout ça m'a pris quatre heures durant lesquelles il s'est vu mourir (…) J'ai mis une seringue d'hypnovel, il est mort dans les bras de sa femme. Vous ne pouvez pas savoir combien je regrette ces quatre heures de perdues", a-t-elle ajouté, très émue, déclenchant les larmes de Julie Bonnemaison, l'épouse de l'accusé.
- Il est mort avec le sourire -
 
Le docteur Jean-Michel Gouffrand, chirurgien depuis 35 ans à Bayonne dans une clinique privée, a lui avoué ouvertement avoir provoqué la mort d'un de ses amis: "Il m'a demandé: +c'est toi qui va me faire la piqûre demain matin?+ Le lendemain, je lui ai fait une petite piqûre de morphine, je lui ai pris la main et il a souri. Il est mort avec le sourire", a-t-il raconté.
Dans la matinée, Jean-Pierre Lacassagne, cardiologue à Biarritz, a aussi déclaré avoir pratiqué cinq "euthanasies", dont trois fois seul, avec de "l'hypnovel et du curare".
 
Bernard Senet, 65 ans, généraliste et praticien dans le Vaucluse a avoué avoir aidé aussi des patients à "partir". "Pour un généraliste comme moi, ça peut arriver une à deux fois par semaine", a expliqué le médecin.
"On pourrait être très nombreux assis sur le banc à la place de Nicolas Bonnemaison. Il y a deux cas: soit des patients conscients, qui le demandent (...) et vous avez le cas des patients de Bonnemaison qui ont une espérance de vie très courte parce qu'ils ont une pathologie très lourde et qu'on aide à partir", a-t-il dit.
Le professeur Philippe Dabadie, qui a organisé les soins d'urgence pour l'ensemble de l'Aquitaine, a lui posé une autre question, gênante: "A-t-on le droit de prolonger une agonie ?"
"Autrefois, on utilisait des cocktails lytiques (qui peuvent entraîner la mort, ndlr) et on fermait la porte, on ne s'est jamais retrouvé devant la Cour d'assises", a-t-il ajouté.
Puis le spécialiste a répondu à Me Arnaud Dupin, avocat de M. Bonnemaison, qui l'interrogeait sur une patiente à laquelle il aurait administré du Norcuron (curare).
"Dans ce cas là, cette femme était morte cliniquement, mais à travers des données physiologiques, elle exprimait ses douleurs. Je peux vous mimer ces douleurs, c'est horrible. Cette femme était déjà en fin de vie", a-t-il expliqué.
Au total, cinq médecins ont décrit jeudi des actes d'accélération de la mort, montrant la ligne ténue entre la "sédation", destinée à apaiser la douleur et pouvant avoir comme effet secondaire la mort, autorisée par la loi Leonetti sur la fin de vie, et l'euthanasie, dont le but premier est de donner la mort, interdite en France.
Nicolas Bonnemaison, accusé d'avoir abrégé la vie de sept patients en phase terminale en 2010 et 2011, comparaît jusqu'au 27 juin.
Vendredi, la cour entendra les témoignages de deux anciens ministres, Bernard Kouchner, ancien ministre de la Santé (1992-1993) et Michèle Delaunay, ex-ministre en charge des personnes âgées (2012-2014), tous deux médecins.
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