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 Fin de vie et Alzheimer...

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MessageSujet: Fin de vie et Alzheimer...   Fin de vie et Alzheimer... Icon_minitime02.10.13 17:01

Alzheimer : savoir ou pas ?Joséphine Bataille
Créé le 20/09/2013 / modifié le 24/09/2013 à 17h29


© DURAND FLORENCE/SIPA © DURAND FLORENCE/SIPA La maladie d'Alzheimer touche environ 800 000 personnes en France et ce chiffre ne cesse de s'accroître. Faut-il se faire dépister ? Quels sont les enjeux éthiques du diagnostic précoce ? Le professeur Emmanuel Hirsch répond à nos questions.


90 % des Français seraient prêts à se faire diagnostiquer la maladie d'Alzheimer si c'était possible. C'est ce que révèle l'étude réalisée par TNS-SOFRES pour l'Espace Ethique Alzheimer qui l'a rendue publique cette semaine, à l'occasion de son université d'été Alzheimer. L'enjeu est de taille, pour la réflexion. Car le nombre de malades ne cesse de s'accroître. 1,2 % de la population française est diagnostiquée de la maladie d'Alzheimer (entre 750 000 et 850 000). 250 000 personnes sont diagnostiquées tous les ans et l'on estime qu'en 2050, ce sera 3 % de la population qui sera concerné. Dans le monde, c'est un nouveau cas toutes les sept secondes. Cette maladie, liée à l'allongement de la vie, est la plus fréquente des formes de démences. Or, désormais, la médecine prédictive, fondée sur des tests de prédisposition notamment, est en train de se banaliser. Et l'on sait tous les avantages qu'il y a à traiter le plus précocement possible les malades.

Pour autant, la maladie d'Alzheimer a des caractéristiques bien spécifiques. A quoi bon savoir, s'il n'y a pas de traitement possible? Actuellement, les médecins encouragent les personnes présentant de possibles symptômes (troubles de mémoire, du sommeil, de l'humeur) à consulter au sein d'un centre mémoire. Cela permet d'être rassuré (deux personnes sur trois ne sont pas atteintes), ou bien, le cas échéant, d'être accompagné au mieux dans l'anticipation de l'évolution de la maladie, avec les aides physiques, financières, institutionnelles adéquates. Cela permet aussi d'avoir l'opportunité de participer à des essais thérapeutiques. Parallèlement à l'effort porté sur un diagnostic précoce, les chercheurs travaillent sur les causes et mécanismes de la maladie ; on parle déjà de tests génétiques de susceptibilité, ce qui posera la questoin d'un dépistage en l'absence de symptômes.

A partir de quand informer ? Et qui informer d'une maladie qui a un impact majeur sur les proches ? Faut-il savoir ou pas ? Analyses, à la veille de la journée consacrée à la maladie, du professeur Emmanuel Hirsch, le directeur de l'Espace éthique Alzheimer.

Pourquoi savoir ?

Les maladies de l'esprit sont des maladies de la liberté. Exposées au risque de ne plus pouvoir décider pour elles-mêmes, les personnes veulent pouvoir s'organiser, tant vis à vis de leurs proches que sur le plan économique. La question de la connaissance renvoie à la capacité d'anticiper et de maîtriser son destin. Savoir permet de développer une attitude proactive, de mobiliser ses forces contre la maladie, mais aussi de s'approprier une liberté là où, justement, la maladie vient l'entraver. L'idée, c'est que plus on anticipera, plus on pourra être reconnu dans les choix qu'on aura posés — d'où l'importance d'améliorer le dispositif des directives anticipées.

Pendant un temps par le CCNE a estimé qu'il n'était pas éthique de recourir à des tests génétiques concernant une maladie pour laquelle on n'avait pas de traitement (à moins qu'il y ait un risque de la transmettre). Aujourd'hui on a évolué culturellement ; nous sommes dans un contexte très médicalisé où l'idée de diagnostic précoce se banalise, avec l'idée que si on intervient précocement, on aura plus d'efficacité au niveau des traitements. C'est très important, notamment en cancérologie. Le diagnostic précoce permet aussi de suivre les malades et d'observer les mécanisme de la maladie, donc c'est fondamental pour la recherche.

Quelles sont les ambivalences de la volonté de savoir ?

Ce qui est insupportable, c'est le doute. Les gens veulent savoir pour sortir du doute, lorsqu'ils présentent des symptômes inquiétants, quitte à apprendre le pire. Mais qu'est ce que cela signifie de savoir, et comment en pratique un malade peut-il s'organiser pour s'approprier ce savoir ? Nous devons y réfléchir sérieusement. Dans une société qui a sacralisé l'esprit et l'intelligence, les démences constituent une véritable perte de son intégrité ; apprendre que l'on est en est atteint n'a pas les mêmes incidences que de se découvrir une autre maladie. Savoir que l'on est Alzheimer, c'est savoir que l'on sera dépendant de ses proches. Que dire aux aidants ; veulent-ils savoir eux aussi, et rentrer au plus tôt dans cette logique ? L'enquête Sofres que nous venons de réaliser nous a énormément surpris. Elle établit que 90 % des Français voudraient faire un test de diagnostic précoce si cela existait, alors même qu'il n'y a pas de traitement. Les gens disent qu'ils veulent savoir, même s'ils n'ont pas d'antécédents familiaux, et qu'ils ont conscience qu'un test est marqué par l'incertitude. Nous sommes, depuis la loi du 4 mars 2002, dans une logique de démocratie sanitaire. On parle de droit à l'information du patient. La question de l'autonomie de la personne a été érigée en priorité. De fait, le paternalisme médical n'est plus toléré."

La connaissance de sa maladie et de son évolution est aussi une clé d'entrée dans le débat sur la mort assistée...

Alzheimer est une maladie de la grande dépendance, où l'on anticipe que l'on ne sera plus soi, et où l'on se demande quel regard la société posera sur soi. Il y a évidemment un impact sur la conception de sa propre dignité. Pour certains, Alzheimer c'est la mort dans la vie ; la mort psychique ; cela fait partie du discours habituel des malades. Donc peut se poser la question de l'euthanasie. Je pense qu'il faut moins s'interroger sur la mort que sur la vie qu'on propose. Il faut rendre possible la vie jusqu'au bout, en se demandant comment la personne pourra vivre l'instant présent. Qu'en sera-t-il du relationnel, de la vie à domicile, sera-t-elle dans un lien enfermant, ou d'ouverture à la société... ?"

La question est politique

Eminemment. C'est pour cela que cette université d'été Alzheimer est un important moment démocratique. Il y a une euthanasie sociale qui ne nous donne plus droit d'exister dans la société. Certains pays ont apporté des réponses très solidaires à ces situations. Nous, avons posé dans la loi le principe de l'autonomie, pas de l'interdépendance des personnes. Il faut réfléchir à cela pour que la démence ne soit pas un moment de déqualification sociale. La question économique est aussi de premier ordre, en ce qui concerne un maladie chronique. Quel reste à charge pour les familles ? Quelles pressions des laboratoires pour le développement de tests de susceptibilité ?
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