HANDICHRIST

Pêle-mêle, tout et rien
 
PortailS'enregistrerConnexionFAQCalendrierAccueilRechercher
 

 Chat sur la fin de vie avec R.Aubry

Aller en bas 
AuteurMessage
Admin

Admin


Féminin Messages : 24286

Chat sur la fin de vie avec R.Aubry Empty
MessageSujet: Chat sur la fin de vie avec R.Aubry   Chat sur la fin de vie avec R.Aubry Icon_minitime12.03.12 10:37

Indira : Est il humain de laisser des personnes atteintes de maladies dégénératives (Alzheimer ou Parkinson) agoniser pendant des jours, mourant de faim et de soif, hors d'état de communiquer ? N'est-ce pas le comble de l'hypocrisie ?

Dr Régis Aubry : Si l'on présente les choses de cette manière, il est évident que ma réponse est non. Il ne serait pas humain de laisser mourir de cette façon les personnes. Par contre, il est important que l'on s'interroge sur ce que vivent les personnes atteintes, par exemple, de démence évoluée, sur ce qu'elles éprouvent. En effet, le regard que l'on porte sur ces personnes ne correspond peut-être pas à ce qu'elles vivent et ressentent.

François : Dans le cadre de la prise en charge de la fin de la vie, faites-vous une différence entre les malades et les personnes âgées ?

Oui. L'expérience de la fin de vie n'est pas la même selon que l'on est atteint d'une maladie incurable ou que l'on soit vieux. Dans le premier cas, les personnes font l'expérience de leur vulnérabilité et, paradoxalement, dans le second cas, les personnes n'éprouvent pas d'inconfort et elles ne sont pas malades. L'accompagnement de ces deux situations ne sera donc pas de même nature.

motspassants : Ce qui semble faire débat est d'une part, la peur qu'une législation rende systématiquement légal l'acte d'euthanasie, et d'autre part qu'une absence de législation laisse la porte ouverte à des abus. Comment concevez-vous cette contradiction apparente?

Pour moi, ce qui fait débat est de deux ordres. Premièrement, est-ce à la loi de répondre à des questions qui se posent dans le champ de la complexité et de la singularité. Deuxièmement, ce qui de notre point de vue fait débat est la réponse qu'il faut donner à la demande d'euthanasie. Je fais une grande différence entre une demande qui est formulée par une personne qui ne veut plus vivre de la manière dont elle vit au moment elle la fait (c'est ce qui fait débat), et l'idée que l'on puisse donner la mort à des personnes qui ne le demandent pas...

Nicolas : En Europe, quels sont les pays dans lesquels l'euthanasie est admise ? Quel constat fait-on dans ces pays sur la pratique et ses effets ?

L'euthanasie est dépénalisée aux Pays-Bas et en Belgique. Ce que l'on constate, c'est que à législation très proche, les études dont on dispose montrent que les pratiques médicales en fin de vie sont très différentes dans ces deux pays.

Si l'euthanasie, dans le cadre très restreint de la loi hollandaise ou belge, n'est pas en augmentation depuis le vote de la loi, on est surpris qu'en Belgique, les pratiques d'augmentation des antalgiques ou les pratiques de sédation (comas induits par des médicaments) sont en augmentation, cela révèle peut-être une possibilité de transgression de la loi pourtant favorable à l'euthanasie.

Noé : Etes-vous favorable à la proposition de François Hollande ?

La position de l'Observatoire est la suivante: il s'agit de fournir aux décideurs et aux législateurs les éléments susceptibles de fonder un débat. Ce débat nous semble le préalable à toute orientation politique.

Axou25 : Quel est l'opinion majoritaire chez les médecins spécialisés dans les soins palliatifs en France : statu quo sur la loi Léonetti ou avancer vers une euthanasie plus "'active" ?

Très majoritairement, les acteurs de soins palliatifs font le constat d'une insuffisance de connaissances et d'application de la loi française qui interdit l'acharnement thérapeutique. Ce fait engendre des situations de grande complexité au cours desquelles peut émerger la demande d'euthanasie. Il apparaît donc nécessaire aux acteurs de soins palliatifs de faire en sorte que cette loi originale soit correctement mise en œuvre.

Ama : Je suis infirmier. On nous demande chaque semaine de "débrancher" des incurables pour "faire de la place" à de nouveaux cas. L'hypocrisie dont tout le monde fait preuve me dégoûte. L'euthanasie c'est du quotidien pour nous. Et personne ne nous aide, psychologiquement à faire face.

Cette expérience montre combien les situations de fin de vie, et surtout la façon dont on les traite, peuvent déboucher sur de véritables souffrances des soignants et sur le non respect des personnes malades. Introduire l'enseignement de l'éthique médicale est pour nous une urgence afin de modifier les pratiques professionnelles.

Marie (infirmière cadre de santé) : Comment l'accompagnement de fin de vie peut-il être compatible avec les logiques comptables de DMS (durée moyenne de séjour)?

C'est une remarque intéressante. Je souhaite que l'on valorise, dans un contexte de performance des structures et des acteurs de santé, la réflexion éthique susceptible de conduire à des limitations ou des arrêts de traitement jugés déraisonnables imposant des soins palliatifs et un accompagnement de la souffrance des personnes. Ceci doit faire l'objet d'une réflexion au sein du ministère de la santé.

Guest : Comment doit-on procéder pour exiger de sa famille ou d'une équipe soignante qu'elle ne nous fasse pas subir d'acharnement thérapeutique si un jour cela "pouvait se produire" ? Est-il possible de donner ses volontés par écrit ?

Ceci est inscrit dans la loi française, mais n'est malheureusement pas assez connu : toute personne malade peut écrire ses directives anticipées en étant le plus précis possible sur ses souhaits et la justification de ses souhaits. Plus ces directives seront précises, plus elles devront être prises en compte dans les décisions médicales. Je rappelle tout de même que dans la loi, les souhaits des personnes malades capables de s'exprimer s'imposent aux décisions médicales.

Mathieu : Quelle est l'influence de la religion (catholique notamment) sur l'évolution du débat?

Dans le rapport de l'Observatoire, on montre que les religions ont finalement assez peu d'influence sur l'opinion des personnes à propos, par exemple, de l'euthanasie. Il semble que plus de la moitié des catholiques interrogés par sondage sont favorables à l'euthanasie... Le problème des sondages étant toujours qu'ils interrogent des personnes qui ne sont pas en situation de fin de vie et à qui on demande de se projeter dans de telles situations...

Ama : Vous dites qu'il faut "introduire l'enseignement de l'éthique médicale" "afin de modifier les pratiques professionnelles". Le problème n'est pas seulement éthique, malheureusement. Il est économique : il faut "débrancher" pour accueillir de nouveaux patients. Quelles perspectives de solutions entrevoyez-vous à cela ? (des cyniques disent autour de moi : "Des soins pour ceux qui peuvent payer, comme ça l'euthanasie se fait d'elle même, pour les pauvres, dans leur maison"). La réalité financière est plus concrète, plus pesante, que le noble souhait d'Hippocrate de maintenir en vie.

Si nous ne pouvons pas ignorer les contraintes économiques dans le champ de la santé, notre éthique du soin et du respect des personnes doit nous amener à protéger les plus vulnérables, c'est-à-dire les grands malades. Pour éviter que de telles questions se posent au final, n'est-il pas pertinent d'introduire le questionnement très en amont, à un moment où la question de la pertinence de certains traitements se pose?

Nicolas : Nicolas Sarkozy évoque l'idée de "mourir dans la dignité" lorsqu'il parle de l'euthanasie. La dignité à ce moment-là, n'est-elle pas de mourir au moment où on l'a décidé ?

La question de la dignité est un peu "tarte à la crème". Que faut-il privilégier? La réponse à la demande d'euthanasie ou l'analyse du sens de cette demande, et ce, dans un contexte très utilitariste de la vie (selon une étude belge récente, 23% des patients demandeurs d'euthanasie formulent cette demande parce qu'ils ont le sentiment de ne plus servir à rien...).

V: Ma mère va se faire doublement opérer du cerveaux dans 2 jours. Elle a déjà tellement souffert qu'elle nous demande de ne surtout pas essayer de la sauver en cas de complication. Elle ne veux pas, à raison à mon avis, finir sa vie en "légume". Si cela ce passe mal le chirurgien peut-il faire le geste qui terminera la vie et pourrait être considéré comme un geste d'euthanasie ? Est-il obligé de tout faire pour sauver son patient au risque de le laisser en piteux état contre sa volonté ? Quelle est sa marge de manœuvre?

Le chirurgien doit se poser la question du rapport entre les chances et les risques de l'intervention à laquelle il va procéder. Il peut décider de ne pas mettre en œuvre ce traitement si la patiente l'estime déraisonnable. Il peut s'engager à ne rien faire pour maintenir artificiellement en vie cette dame si l'intervention est suivie de complications.

Matt : Comment procède-t-on pour décider de maintenir une personne en vie ou de l'aider à mourir (non alimentation ou débranchement des machine comme cela a été évoqué plus haut par Ama) lorsque la personne ne peut pas s'exprimer et que l'entourage n'a pas été retrouvé ?

Dans ce cas, tous les acteurs de soins concernés par les soins palliatifs et l'accompagnement de cette personne doivent se réunir et se poser la question de la qualité de la vie de cette personne et du sens de sa vie.

Si, au terme d'un tel débat, il apparaît que cette vie maintenue artificiellement ne doit pas l'être, tous les traitements susceptibles de prolonger indûment cette vie doivent être arrêtés. Les soins palliatifs doivent alors être prodigués pour éviter tout symptôme d'inconfort jusqu'au décès de la personne.

Yolande : Marie de Hennezel a démissionné de l'observatoire de la fin de vie, elle juge qu'il n'y a rien dans le rapport que vous rendez. Vous répondez quoi?

La démission de Marie de Hennezel est liée à un désaccord sur les missions de l'Observatoire. L'Observatoire ne doit pas prendre partie dans le débat concernant l'euthanasie. Marie de Hennezel exprime son opposition à l'euthanasie et aurait souhaité que l'Observatoire travaille dans ce sens.

La mission de l'Observatoire est de rassembler toutes les données disponibles pour éclairer le débat public. C'est ce qu'il a tenté de faire pour cette première année. Des travaux d'enquêtes et de recherches ont été investis et sont en cours. Ils seront publiés prochainement.

Source=Chat virtuel modéré
Revenir en haut Aller en bas
http://handi-christ.forumactif.com
 
Chat sur la fin de vie avec R.Aubry
Revenir en haut 
Page 1 sur 1

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
HANDICHRIST :: Médecine: début et fin de vie-
Sauter vers: